mardi 26 juillet 2016

Vico Mondragone 33, Napoli, Scala B (récit)

On dirait le sud.


En quittant Florence, l'autoroute est bordée de magnifiques propriétés plantées sur des collines douces auxquelles on accède par des allées de cyprès. Le vert reposant des oliveraies est délimité par la raideur sombre et haute des arbres, le tout clairsemé de belles villas claires. L'attentat de Nice n'est pas loin et j'ai en tête le souvenir de "Fragile" chanté en par Sting, un soir de septembre en Toscane.
Passé Rome c'est comme si l'autoroute reliait deux mondes parallèles, celui de Florence, propre, italien mais mesuré et celui de Naples, délabré, bruyant et sale. Une sorte de quai 9 3/4 qui conduirait dans une autre dimension.
L'entrée dans Naples est un choc. Je vois dans le rétroviseur les mines des filles qui s'allongent. Le contraste avec Florence et ses belles façades est saisissant. En arrivant de l'autoroute nous suivons les quais du port de commerce. La chaussée est défoncée, des chantiers longent la voie ferrée abandonnée sur laquelle nous roulons en alternance avec une voie faite de pavés mal chaussés. A gauche on devine plus qu'on ne voit le port masqué par des panneaux de chantier, à droite des immeubles délabrés semblent abandonnés. Une circulation exubérante et désordonnée surgit de tous les cotés à grand renfort de coups de freins et de klaxons. La bonne humeur florentine qui huilait les rouages des flots de voitures semble remplacée par les aboiements des voitures. Des scooters suicidaires ressortent miraculeusement du capot de Titine.

Le parking et la mafia.


Nous avons rendez-vous avec notre loueur sur la Piazza del Plebiscito, place principale de Naples, devant le bar le Gambrinus. Il aura un scooter sombre et nous reconnaîtra par la description que nous lui avons faites de notre petite voiture. Nous avons deux heures d'avance et décidons d'aller nous poser près de l'appartement dont nos avons l'adresse. Nous embouquons une petite rue qui monte à partir de la place en direction du château qui surplombe la ville. Étroite, encombrée de chaises, de pots de fleurs, d'étalages de boutiques et peuplées de scooters voltigeant dans tous les sens, nous y suivons les indications qui promettent un parking, espérant y mettre Titine à l'abri de la mauvaise réputation de la ville. Durant le trajet depuis Florence nous avons parlé de la réputation de Naples, de la Mafia qui contrôlerait toujours le ramassage des ordures, les parkings et les différents trafics. Sous un panneau "P" blanc sur fond fond bleu plus grand que les autres, une flèche indique l'entrée et nous pénétrons dans ce qui ressemble à un garage d'immeuble. Des voitures garées en vrac, une lumière blafarde et une cahute vitrée dans laquelle nous distinguons deux visages patibulaires éclairés par la seule lumière d'un écran d'ordinateur, c'est le spectacle qui nous attend quand l'éblouissement du soleil nous abandonne et que nos yeux s'habituent à la pénombre. D'un signe du menton nous désignant, le plus vieux envoie son Padawan s'occuper de nous. Rapidement, nous décidons de changer nos plans et d'appeler l'homme au scooter gris pour qu'il nous indique un parking ayant sa caution morale. En baragouinant trois mots d'anglais, nous quittons nos hôtes, filons nous garer devant le Gambrinus et passons le coup de fil salutaire.

Rendez-vous avec l'homme au scooter gris.


Le scooter est devant le bar dans la demi-heure comme promis au téléphone par notre sauveur. Guiseppe se présente, jovial, parlant bien français et distribuant moult commentaires sur les bâtiments et leur histoire, les visites à faire absolument et les dégâts du tremblement de terre de 1980. Dans la discussion, il nous indique avoir changé notre location pour un autre appartement. Le choix du parking n’était pas judicieux, on s'en doutait un peu. Un tour à l'arrière du scooter pour aller chercher Titine là ou je l'ai garée provisoirement et nous voilà repartis en convoi dans les petites rues, guidés par Guiseppe sur son scooter gris.
Lui à fond, nous accrochés à nos sièges, priant pour ne renverser personne, nous arrivons dans un parking éclairé et notre guide négocie un demi-tarif pour les 3 jours à venir.
15 minutes de déambulation dans les rues en pente accrochés à nos valises à roulettes nous mènent devant la grille d'entrée d'un vieil immeuble décrépi, comme le sont tous les immeubles du quartier. Les mines des filles s'allongent encore. Nous sommes un dimanche, les commerces sont fermés, le soleil tape dur et les rues puent. La vielle grille en fer ouvre sur une petite cour surplombée de balcons bricolés. Les fils électriques semblent tomber du ciel et tapissent les murs. La cour est peuplée de scooters et de grandes poubelles. En se frayant un chemin entre les deux-roues parqués, nous accédons à l'un des deux escaliers.
Certaines pierres de l'escalier B sont tellement usées qu'une plaque de marbre vient refaire le nez de marche. A bout de souffle, suant, nous arrivons avec nos valises au deuxième étage devant une porte blindée.
L'appartement est entièrement refait, bien équipé, confortable et climatisé. Idéalement situé au cœur du vieux Naples populaire, nous accéderons à pieds, en flânant dans les rues pittoresques, aux différents quartiers situés autour de notre camp de base douillet. Le filles reprennent figures humaines. En nous quittant notre sauveur laisse un billet de 10 et la consigne de faire manger des glaces aux filles chez le spécialiste en bas de la rue. Il nous fait à tous la bise, nous laisse des instructions pour faciliter notre départ dans 3 jours et repart sur son scooter dans le soleil couchant. Il faut encore repérer les lieux et trouver de quoi faire un bon repas du soir. La meilleure pizza de Naples est en fabriquée en bas de chez nous, l'épicière la plus roublarde est à coté, qui nous prendra pour des américains descendus de notre yacht à la recherche de spaghettis vendus à prix d'or.
Demain, nous découvrirons Naples et nous savons déjà que toutes les perles ne brillent pas de la même lumière, qu'il faut savoir laisser aller son regard vers la découverte et la surprise.

Coté pratique


A Naples, le but du jeu est de mettre la voiture en sécurité et de découvrir à pieds les différents quartiers, rues et marchés. Bonne chaussures de rigueur, les montées peuvent être raides et les descentes... pentues. L'emplacement du "camp de base" est stratégique.
Dans les petits commerces, fuir ceux qui n'affichent pas les prix. Vous êtes touristes et vos tickets de caisse seront une suite de prix arrondis suivis d'un total... "exotique" pour le moins.
Le parking à la journée peut être cher, il est judicieux de trouver un accord avec votre loueur qui négociera pour vous.


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